Animaux noirs / Pascal Leclercq. 2009

PASCAL LECLERCQ, Animali neri, traduzione e introduzione di Andrea Inglese, La Camera Verde, Roma 2009.

 

Je vis dans le pays du corps interrompu, de la parole hachée où se mêlent bréchets, nervures, cartilages et tendons. Les morceaux fins, on se rue dessus dès la mort, restent les chairs vulgaires qu’on remâche à tout cran, les phalanges passées au rasoir, courbées en deux, pliées en trois, extirpées de leur gaine.
Je viens dans le pays des viandes triturées, j’apporte les œufs, le lait, le persil et la mie, qui donnent texture et saveur aux chairs, forme et substance aux phrases, et je pétris, malaxe, lutte pour maîtriser le flux musculeux de la langue, qui rend les mots méconnaissables, habitants du pays des corps interrompus.

Vivo nel paese del corpo interrotto, della parola spezzata, in cui si mischiano carene, nervature, cartilagini e tendini. Sui bocconi migliori, ci si getta appena morti, restano le carni volgari che si rimasticano con grinta, le falangi passate al rasoio, curvate in due, piegate in tre, estirpate dalla guaina.
Vengo nel paese delle carni triturate, porto le uova, il latte, il prezzemolo e la mollica, che danno struttura e sapore alle carni, forma e sostanza alle frasi, e mescolo, impasto, combatto per domare il flusso muscoloso della lingua che rende le parole irriconoscibili, abitanti del paese dei corpi interrotti.

 


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Du train les maisons semblent simples, mais à peine posé-je le pied au sol, que je me perds dans la variété de leurs compositions. L’impossibilité d’un retour en arrière m’effraye. Au Nord, la rivière transforme ses eaux en bière, ralliant les cuves aux peaux qu’on tanne. Au Sud, un tapir d’acier émerge de la plaine, avale des humains mi-fourmis, mi-chenilles, pour les régurgiter les vertèbres brisées. Cachalot par le crâne, il crache son quota de fumées, mais ses branchies demeurent gorgées de vapeur. Les fleurs aux alentours sont de carton, leurs tiges proviennent des aciéries de la région.
D’un abri de pierre ancien, une énième colonne de fumée se détache, plus petite mais plus dense aussi. La porte s’ouvre, un voyageur en frac, havresac à l’épaule, entre, le violon prêt à vibrer. Quel envoûtement tire-t-il de son archet – nul ne le sait vraiment – pour que soudain s’aplatisse et s’éteigne l’énième colonne de fumée ?

Dal treno le case sembrano semplici, ma appena posato il piede a terra mi perdo nella varietà delle loro composizioni. L’impossibilità di tornare indietro mi spaventa. A Nord, il fiume trasforma in birra le sue acque, raccogliendo nei tini le pelli da concia. A Sud, un tapiro d’acciaio emerge dalla pianura, ingoia esseri umani metà-formiche metà-bruchi, per rigurgitarli con le vertebre spezzate. Cranio di capodoglio, sputa la sua quota di fumi, ma le sue branchie rimangono ingozzate di vapore. I fiori nei dintorni sono di cartone, i loro fusti provengono dalle acciaierie della regione.
Da un rifugio di pietra antica, si stacca un’ennesima colonna di fumo, più piccola ma anche più densa. La porta si apre, un viaggiatore in frac, zaino in spalla, entra, il violino pronto a vibrare. Quale sortilegio fa scaturire dal suo archetto – nessuno lo sa davvero – perché di colpo s’assottigli e si spenga l’ennesima colonna di fumo?

 

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Terrier où nous nous terrons malgré nous, refoulant nos élans vers la lumière, nous disputant l’air saturé de monoxyde et d’acétone. Les idées circulent péniblement par dessus nos têtes, nous les suivons des yeux, les regardons s’échauffer, en venir aux mains, et nous applaudissons lorsque l’une d’entre elles a du plomb dans l’aile. Nous savons pertinemment qu’elles finiront toutes par se casser la gueule.
Nous ne nous levons plus pour évacuer nos déchets, nous prenons nos odeurs en grippe, nul parmi nous n’est en mesure de reconnaître et de récupérer la sienne. La pâleur de nos joues nous fait honte ; nous nous infligeons des estafilades, pour recréer le contraste du sang sur la page. La neige, pourtant, est déjà sale et le pelage hivernal du renard aussi.

Tana dove nostro malgrado ci rintaniamo, concentrando i nostri slanci verso la luce, disputandoci l’aria satura di monossido e d’acetone. Le idee circolano faticosamente al di sopra delle nostre teste, le seguiamo con gli occhi, le guardiamo mentre si scaldano, e vengono alle mani, e noi applaudiamo appena una di loro è malconcia. Sappiamo per certo che finiranno tutte per rompersi la faccia.
Non ci alziamo più per evacuare gli scarti, prendiamo i nostri odori in uggia, nessuno di noi è in grado di riconoscere e recuperare il proprio. Abbiamo vergogna del pallore delle nostre guance; ci infliggiamo sfregi per ricreare il contrasto del sangue sulla pagina. Eppure la neve è già sporca e anche il pelame invernale della volpe.